Huit mois passés à la librairie et pas un seul mot sur Joan Didion… Un très mauvais ratio, si vous voulez mon avis. Il est plus que temps de faire un point sur cette auteure qui, selon moi, est l’un des meilleurs écrivains américains contemporains. Quelques mots d’abord sur cette Joan Didion mal connue en France : Née en 1934, elle fait ses premiers pas comme rédactrice à Vogue très jeune et s’impose comme écrivain dès la parution d‘Une saison de nuit publié en 1963 aux US. On retrouve dans son oeuvre des thématiques récurrentes comme l’Amérique des années 60-70, le mariage et la déperdition de l’être. Sachez aussi qu’elle est considérée comme l’une des influences majeures de Bret Easton Elllis et de Jay McInnery.
Un sacré personnage, en somme, et qui vaut bien tous les détours.
Personnellement, ma fan-attitude a commencé dès la découverte de l’extraordinaire et stupéfiant Maria avec et sans rien, où Didion retrace la vie d’une jeune femme torturée par son quotidien d’actrice, de femme et de mère. Dans de très courts chapitres rappelant des photographies instantanées, elle dresse le portrait incisif d’un mariage et d’une carrière sur le déclin, et parvient à en révéler toute la beauté.
Absolument subjuguée par l’écriture de Didion, j’ai enchaîné sur Démocratie… un roman assez déroutant au premier abord, puisque l’auteur retrace un fait divers survenu en 1975 par le biais du récit de la sœur de la victime. Même si ce n’est pas l’oeuvre la plus représentative de Didion, le roman a pour lui cette construction très maîtrisée et cette écriture forte tout à fait caractéristique des meilleurs écrits de l’auteure.
Maria avec et sans rien
Traduit de l’américain par Jean Rosenthal
Robert Laffont pavillons – 8€
Démocratie
Traduit de l’américain par Dominique Taffin-Jouhaud
Robert Laffont pavillons – 8.90€
Et au mois de mars, oh joie intense!, que vois-je sur les tables? Deux sorties poche : L’Amérique, recueil de ses chroniques journalistiques et Le bleu de la nuit, une petite merveille qui mérite bien plus que les quelques lignes que je vais lui accorder. Dans ce récit autobiographique, Didion revient sur les moments clés de sa vie de famille afin de s’autoriser à faire le deuil de sa fille, morte à l’âge de 39 ans. Il n’y a rien de plus beau que les mots qu’elle emploie lorsqu’elle évoque son enfant perdue, et c’est encore plus triste lorsque l’on sait que l’auteur se remettait tout juste du décès son mari. Le bleu de la nuit permet aussi à Didion de questionner son rapport à l’écriture et de l’évoquer comme une rédemption.
Mais surtout, surtout, la réédition d‘Une saison de nuits, premier roman de Didion (dont je vous ai parlé un peu plus haut). Pour ne pas vous mentir, je me suis jeté dessus. Littéralement. Une saison de nuits contient tout ce qui fera l’identité de Didion : On retrouve la mort du couple, la décadence du rêve américain et la puissance de l’illusion. Avec l’histoire des McCellan, elle nous plonge dans l’intimité tragique de ce couple qui ne sait pas vivre ensemble, qui se détruit et détruit tout ce(ux) qu’il touche.
Le bleu de la nuit
Traduit de l’américain par Pierre Demarty
Le Livre de poche – 6.60€
Une saison de nuits
Traduit de l’américain par Philippe Garnier
Grasset – 20€
Une excellente auteure, à l’écriture poétique et à l’univers emprunt d’une douce mélancolie, que je vous invite vivement à découvrir !