Il en va des écrits comme des individus; certains sont d’un abord facile, d’un naturel aimable. Vous êtes immédiatement à l’aise avec eux, ils vous invitent naturellement à la lecture. D’autres sont plus secrets et tardent à se livrer. Les romans d’Hugo Hamilton appartiennent d’évidence à cette deuxième catégorie. Comme personne est un texte austère sur un sujet grave, la quête d’identité par un homme – Gregor- qui a été recueilli à 3 ans dans Berlin en ruines, et ne l’a appris incidemment qu’à l’adolescence. D’où vient-il ? Est-il juif comme il semble vouloir s’en persuader ? Comment vivre avec le mensonge qu’a constitué son éducation ?
Le récit est constitué de multiples flash-backs, éclairant les moments-clés de la vie de Gregor, de la petite enfance à l’âge adulte, ses relations difficiles puis impossibles avec sa famille. Entre ces pages, qu’habitent une perpétuelle tension, les descriptions d’une aimable partie de campagne offrent une respiration bienvenue. On y retrouve Gregor, la cinquantaine avancée, qui a rejoint son ex-épouse dans la campagne berlinoise par une belle journée d’arrière-saison pour participer avec celle-ci, leur fils et quelques amis communs à la cueillette des pommes. La langue et les descriptions sont superbes, avec la sensation que Gregor, à défaut de trouver une réponse à la question qui l’a obsédé toute sa vie, est peut-être en passe de trouver une certaine paix intérieure.
Comme personne n’est pas un livre qu’on dévore en deux temps trois mouvements, mais une lecture qui vous marque pour longtemps.
Traduit de l’anglais (Irlande) par Joseph Antoine
Editions Phébus – 22 euros