Qu’est ce que je peux faire, j’sais pas quoi faire…
Je ne sais pas comment vous êtes fait(e), mais moi, moins j’en fais, moins j’ai envie d’en faire. Et en cette période de vacances (*), vu le niveau d’activité, on ne peut pas dire qu’on frôle le nervous breakdown. « Mais de quoi ils se plaignent, ceux-là ? rétorquez-vous (ne dites pas le contraire, je vous ai vu rétorquer). Moi aussi j’aimerais pouvoir bouquiner sans avoir à me planquer les jours où je glandouille ». Peut-être. Sauf que j’ai un gros problème pour un libraire. Impossible de bouquiner à la librairie. Quand je suis plongé dans ma lecture, j’aime bien qu’on me fiche la paix, C’est une attitude humaine et compréhensible, me direz-vous, mais aussi assez peu commerciale. Vous avez raison car le client a toujours raison. C’est chouette d’être client. Bon, j’essaie donc de m’abstenir et je me limite à Livres Hebdo (c’est le Voici des libraires) et aux suppléments littéraires, lectures dont j’arrive à m’extirper sans trop d’états d’âme et sans perdre mon légendaire sourire. Cela dit, au bout de la 8ème lecture, une fois qu’on est capable de le réciter par cœur à l’endroit et à l’envers, même le Monde des Livres perd un peu de son charme. Faut donc trouver autre chose que la lecture, car l’oisiveté est la mère de tous les vices. Surtout l’oisiveté des autres.
Mais en période de vacances, il semblerait que les neurones se soient faits la malle en même temps que les clients, car la seule idée qui me vient à l’esprit pour occuper le petit monde des Buveurs d’Encre est d’une affligeante banalité, tous les libraires vous le diront. Cela peut se résumer ainsi « Tiens si on faisait des retours ? ». Et hop, sitôt dit, sitôt fait. On vide les rayons, on déplace les livres, on les scanne, on les empile, on scotche, on stocke, et on se retrouve très vite avec 12 cartons qui nous forcent à onduler de la croupe et pratiquer une sorte de danse du ventre pour se déplacer dans la réserve. C’est peut-être esthétique (quoique dans mon cas j’en doute) mais c’est vite assez chiant. N’empêche que faire des retours, c’est une bonne fatigue et cela donne l’impression gratifiante de faire avancer les choses. Ah, saine jeunesse ! Sauf que si on continue à remplir des cartons à ce rythme, on va se retrouver avec une librairie vide à la fin des vacances, pile poil au moment du retour des hordes affamées de lectures. Ce qui n’est pas tout à fait le but escompté et révèlerait un singulier manque de vision managériale, tout mon contraire vous pensez bien. Va donc falloir trouver autre chose.
Et les filles, si on vérifiait les stocks, cela fait longtemps qu’on l’a pas fait ? (depuis la dernière période de glandouille, en fait). Faut dire que la vérification des stocks, c’est un peu l’équivalent de la revue de paquetage à l’échelle de la librairie, la partie mâle la plus croulante du lectorat, celle qui a fait l’armée, comprendra tout de suite ce que je veux dire. Les autres, hélas de plus en plus nombreux (**), doivent savoir que :
- c’est une activité sans fin. Cela s’arrête quand le chef le décide et pas avant
- c’est une activité frustrante et potentiellement conflictuelle. Quoi que vous fassiez, ce ne sera jamais parfait du premier coup. Vous allez forcément oublier de rectifier des erreurs de stock.
- c’est une activité dont l’utilité est toute relative. Ben oui, il est plus là, le livre. Perdu ? Fauché ? Mauvaise manip ‘ ? On sait pas. Et maintenant on fait quoi ?
Non vraiment, la vérification de stock, c’est pas vraiment mon truc et je ne me vois pas passer le mois d’août la dessus. Si on avait plus de place, j’envisagerais bien l’achat d’une girafe. On passerait des heures heureuses à la peigner, on lui ferait de longues tresses, ce serait mignon. Mais bon, quelque chose me dit que ça va pas être possible. Tout compte fait, j’ai une meilleure idée, je vais me mettre en avance en écrivant un article pour le blog.
(*) au risque de vous décevoir, apprenez que vous n’êtes pas totalement en direct live. Ceci pour éviter d’éventuelles coupures d’alimentation dues à une trop forte activité. Ce qu’on est organisés, tout de même…
(**) hélas, pas pour cause de militarisme acharné, vous pensez bien, mais parce que ça me repousse dans le camp des vieux, un peu comme les repas de famille où on glisse au bout de la table, année après année. à ce genre de choses les jours Je sais, c’est dingue on croirait pas, mais c’est pourtant la triste vérité. Ah, suspendre des ans l’irréparable outrage…