Voilà sans doute le « premier roman français » dont on va parler en priorité lors de cette rentrée 2012. La théorie de l’information devrait susciter l’intérêt et l’ enthousiasme des commentateurs tant par l’ambition du propos que par la qualité et l’originalité du traitement. Sujet ambitieux qu’a choisi Aurélien Bellanger pour son premier roman, car c’est avec l’histoire des mutations des techniques de l’information depuis l’apparition du minitel, rien de moins, qu’il a choisi de se colleter. Une histoire qu’il nous fait suivre à travers le parcours de Pascal Estranger, adolescent timide et assez falot, issu des classes moyennes de banlieue, et geek avant l’heure, qui deviendra successivement pionnier des messageries roses, fournisseur de communications « hard discount » puis gourou du web dans ses applications les plus futuristes.
Dit comme ça, ca ressemble à du Houellebecq, auquel l’auteur a d’ailleurs consacré l’écriture d’un essai… Mais si l’influence est perceptible, en particulier à la lecture des premiers chapitres du roman, il serait injuste de réduire l’auteur à un rôle de suiveur, qu’il n’est pas. Car si le profil du personnage principal, le choix d’une narration très factuelle (La théorie de l’information est un roman très documenté), le sujet même, qui interroge notre modernité, rappellent l’auteur de la carte et le territoire, la théorie de l’information explore ses propres territoires narratifs et interrogations philosophiques.
C’est donc un roman aussi original que brillant, à la narration très maîtrisée, qui vous est proposé. Un roman qui peut aussi déstabiliser; je reconnais bien humblement n’avoir pas compris tous les tenants et aboutissants de la fameuse théorie de l’information développée par Pascal Estranger dans les courts chapitres qui s’intercalent dans une narration autrement très fluide. Quelle est la part de vérité scientifique ? La part de fiction ? Le lecteur (moi, en tout cas !) est bien incapable de trancher, ce qui est assez troublant et n’enlève rien au plaisir de la lecture, au contraire.
Gallimard – 22.50 euros