Il aura fallu attendre un quart de siècle et la décision des éditions Zulma de le publier en français pour découvrir ce livre inclassable que l’éditeur présente comme l’un des livre majeurs de la littérature catalane, premier volet d’une trilogie intitulée « Le jardin des sept crépuscules ». Il est impossible de résumer ce roman, on ne s’y risquera donc pas. Disons simplement que ce pourrait être une variation moderne autour du Décaméron.
« Barcelone, à la première alerte atomique de son histoire, connut une hécatombe ». Ainsi débute le récit. Fuyant la ville, un petit groupe de personnes, toutes d’un milieu ultra privilégié, trouve refuge dans un véritable paradis terrestre, lieu irréel, luxueux, protégé de toutes les vicissitudes. Durant trois jours, à tour de rôle ils vont prendre la parole et se raconter des histoires.
Phrixos le fou est un véritable roman gigogne, une histoire ouvrant sur une autre, qui à son tour en introduit une troisième, la mystérieuse histoire de la banque Mir, de ses propriétaires et dirigeants successifs constituant une sorte de fil rouge. Labyrinthique, le récit est absolument hors du temps et ne vise à aucune sorte de vraisemblance. Ainsi, la catastrophe nucléaire est à peine évoquée lors d’un repas, entre la poire et le dessert, et le sujet rapidement évacué par l’une des convives, pressée d’entendre la suite des délectables histoires de la tablée. Mais ce caractère délibérément artificiel fait justement une bonne partie du charme du roman, qui mêle la fable, le roman d’espionnage, les évocations mythologiques et mille autres choses encore.
Ce premier volet s’interrompt au milieu de la troisième journée et dernière journée, nous laissant en plein suspense. Car j’oubliais de la préciser « Le jardin des sept crépuscules »est aussi un roman à intrigues ! Le deuxième volet paraîtra en 2014 et les lecteurs de Phrixos le fou l’attendront tous, j’en suis sûr, avec impatience.
Traduit du catalan par François-Michel Durazzo
Editions Zulma – 22.50 euros